Art martial à l’origine, le terrain du Tai Chi Chuan est l’action
et le mouvement; c’est donc sur la nature de celui-ci
et sur ses éléments essentiels que son attention se porte.
Expression de la pensée taoïste qui prône la simplicité et la nature comme modèle, il recherche l’action la plus simple, efficace et
libre d’éléments superflus, qu’ils soient d’ordre corporel, esthétique, rituel, etc.
La lenteur d’exécution engendre des espaces d’observation,
utilisés pour examiner ce qui est à l’œuvre dans chaque situation, d’une manière curieuse et non-jugeante.
Cette posture de réceptivité est tout particulièrement soulignée
dans le Tai Chi Chuan de Cheng Man Ch’ing, probablement
en raison des pratiques artistiques qu’il développait
en parallèle avec sa recherche dans le Tai Chi.
Il recommandait d’investir dans la perte, autant dire dans l’écoute
non liée à un résultat, dans l’essai, dans l’erreur comme espace d’apprentissage… Remarquer, accepter, investiguer,
ne pas s’identifier, quoique consignes appartenant
à la tradition bouddhiste, se rapprochent de cette position.
Leur déploiement crée un cadre pour l’écoute en finesse
de nos sensations physiques et émotionnelles,
de nos vécus intérieurs et extérieurs et de la façon
dont ils sont constamment affectés par l’interrelation
avec l’environnement et les autres. Nous avons ainsi l’opportunité
de découvrir la manière dont nos intentions, souvent inconscientes (liées à notre histoire et nos conditionnements), déterminent
nos comportements à notre insu.
Ce travail de clarification des intentions et leur utilisation consciente sont au cœur de notre tradition (le travail du Yi). Ces points,
essentiels aux origines martiales du Tai Chi Chuan, le sont tout autant dans le domaine de l’expression et de la créativité personnelle.
Génératrice d’action et moteur du changement, l’intention (le Yi) est, dans le Tai Chi Chuan de Cheng Man Ch’ing et Huang Sheng Shuan, toujours enracinée et nourrie par la réceptivité,
l’ouverture non jugeante et curieuse à ce qui est là, maintenant.